Captifs

Bien sûr, son sort n’avait pas atteint sa cible, il lui avait été renvoyé… Il aurait dû se douter qu’ils étaient préparés à ça… Le fameux Ephrem s’était approché de Vingt-deux, ce dernier n’avait même pas pu dire quoi que ce soit en réaction à tout ça qu’il s’était fait assommé… Quelques temps plus tard, il ne savait pas combien exactement, si ça se trouvait, il avait passé plusieurs jours évanoui… Il se réveilla dans une position pas forcément favorable pour lui. Déjà, il était attaché, ce qui n’était sûrement pas quelque chose de très rassurant, et surtout, le plus important, il n’avait plus aucun vêtement ! Tout le monde pouvait le voir tout nu ! … Attends, mais qu’est-ce que c’était que ces réflexions ? D’accord, il était perturbé d’être dans cet état, mais ça ne devait pas être sa priorité. À côté, il y avait Ephrem ; il avait l’air quelque peu différent de la dernière fois qu’il l’avait vu… Est-ce que c’était le même ? Quoiqu’il en soit, le petit mage se mit à gémir :

« S-S’il vous plait, laissez-moi partir… »

Comme si ses yeux de cocker allaient l’amadouer… Ce fut Stephano qui débarqua juste après, et lui, ça ne servait à rien de lui faire un regard de chien battu, Vingt-deux en était certain… ! Il remarqua alors qu’on le tirait en direction de l’une de ces cuves qu’il avait vues toute à l’heure… Le Mage Noir se mit à paniquer.

« N-Non non ! Non, s’il vous plait ! Je veux pas y aller ! J-je ferais tout ce que vous voulez !! »

Ça n’avait pas plus d’effet d’implorer leur pitié… Il tenta de se tortiller pour les empêcher de le manipuler comme ils l’entendaient, mais Ephrem le tenait… Après que Stephano lui ait mis un masque, on le laissa seul dans la cuve, et on commença à la remplir avec cette eau verte… Vingt-deux ne savait plus ce qu’il devait faire, il se retrouva rapidement entièrement dans cette eau, plus paniqué que jamais ; il ne se sentait pas très bien, ce n’était pas juste que de l’eau ça, hein… ? Il avait renoncé à se débattre, il ne pouvait de toute façon pas sortir d’ici et sentait qu’il n’en avait pas la force, de toute façon… Il appela mentalement Joan, plusieurs fois, il attendit comme s’il espérait une réponse… Il s’excusa de ne pas pouvoir l’aider, puis n’arriva plus à penser correctement, il voulait juste dormir… Il ferma doucement les yeux avant de sombrer dans le coma.

Ils avaient rapidement vidé l'eau et sorti le mage du tube. Il l'avait rincé et séché et Stephano prenait ses constantes. Il était stable, mais pour avoir immergé grands nombres d'individu dans la mako, Stephano savait ce qu'il arrivait au sujet.

"La poisse...il est dans le coma l'imbécile. Ça va pas plaire à Orca ça..."

Le coma pouvait signifier une intolérance à la mako, une seconde immersion risquerait de le tuer.
Stephano contacta Orca et quelques minutes plus tard, l'homme était là. Ils étaient tous deux autour de Vingt-deux qu'ils avaient allongé et que Stephano examinait encore. Ephrem avait été reconduit par Orca, il avait une autre mission à lui confier, un sujet dissident en cellule 85. Ephrem avait simplement hoché la tête et quitté la pièce en silence.

-"Je ne cacherais pas ma déception...Crois-tu qu'il y aurait un moyen de le plier à nos exigences sans l'emploi de la mako ?"
-"Je vous ai connu moins sensible. Vous n'hésitiez pas à éliminer les candidats trop faibles. Vous vous êtes si entiché de celui-là ?" demanda Stephano le sourire aux lèvres.

Surtout que tous savaient qu'Orca peinait à tenir Ephrem. Celui qu'ils considéraient pourtant comme son bras droit. Un ancien sujet devenu le bras droit d'Orca, ça avait déjà fait jaser pas mal. Alors en plus si le jeune homme avait sa capacité à obéir qui vacillait...Pourtant Orca se fichait pas mal de ce qu'on racontait et qu'on remettait en question son rang au sein de la Deepground.

-"Je sens en lui un gros potentiel. Hojo serait ravi d'avoir un spécimen comme ce celui-là. Mais tu as raison sur un point, je suis trop doux...Peut-être devrais-je confier son "éducation" à quelqu'un d'autre."
-"Dans l'hypothèse où il se réveillerait...A Amaryllis ?"

Orca croisa les bras sur sa poitrine et secoua la tête.

"Impossible, elle est indisponible pour le moment. Elle s'est faite agressé par un jeune sujet qui a mis un sacré souk dans le bâtiment A. Je n'ai pas enclenché l'alarme, mais il avait réussi à faire s'évader une poignée de prisonniers. La situation est maintenant sous contrôle. Ombre et son unité ont récupéré tout ce petit monde."

Stephano haussa un sourcil, il se passait ce genre d’événement et on le mettait pas au courant ? Les alarmes n'avaient pas été déclenchées, pourquoi ? Peur d'effrayer les sujets ou de leur donner de l'espoir. Peut-être qu'Orca savait qu'il n'y avait pas besoin de s'alarmer. De toute façon, ils devaient tous savoir ce qu'ils faisaient...

"Et bien, parlons d'Ombre alors ?"
-"Humm...Je ne sais pas...Ombre à des méthodes particulières." Orca marqua une pause, il semblait en pleine réflexion et puis finalement. "De toute façon, nous ne savons pas encore quand il se réveillera, ça me laisse le temps d'y réfléchir à tête reposée. Transférez-le à l'infirmerie. Si jamais il se réveille et que je ne suis pas là, contactez-moi immédiatement."

Sur ces mots, Orca quitta la pièce et Stephano s'exécuta. Vingt-deux fut déplacé à l'infirmerie la plus proche, on le mit sous perfusion et le prépara comme s'il allait rester un moment dans cet état.

* * *

Ce jeune homme se montrait toujours aussi insolent... S'il s'écoutait, Ombre lui aurait déjà tiré dessus. Trois fois. Ou quatre même, tiens... Finalement, le jeune homme consentit bien à se déshabiller, sous l'œil attentif d'Ombre... qui affichait un air mauvais tandis que l'autre l'insultait... Il allait éviter de trop réagir à tout ça, pas que ça l'encourage à continuer !

« J'en sais rien, j'irais la voir quand j'en aurais fini avec toi. » répondit Ombre par rapport à Amaryllis, ce n'était pas sa priorité pour l'instant... Puis, en désignant les mains de Joan, il ajouta : « Pas assez rapide, j'ai tout vu~ »

Est-ce que ça l'embêtait ? Il y avait intérêt ! En tenant bien fermement son arme, Ombre s'approcha doucement du jeune homme, puis lui ordonna :

« Ne bouge pas. »

Avant de lui tourner autour pour continuer de l'examiner... Il n'avait l'air que de le regarder... Une fois arrivé dans le dos du jeune homme, en s'assurant qu'il ne tentait pas de regarder dans cette direction... Ombre rangea discrètement son arme et sortit une petite corde, avant d'attraper rapidement et fermement les bras de Joan pour les ramener dans son dos et tenter de les attacher ensembles.

« Ne bouge pas, hein ! » répéta Ombre.

Comme si des paroles, ça allait suffire pour qu'il ne réagisse pas...

Une semaine plus tard, jour 22

Vingt-deux commença à se réveiller tout doucement... Qu'est-ce qu'il s'était passé ? Où est-ce qu'il était ? Il était un peu confus... Il ne se sentait pas très bien et avait du mal à remettre ses idées en place. Le mal de tête n'aidait pas... Le petit mage se tint la tête en gémissant, et il remarqua à ce moment-là qu'il était branché à quelque chose... Qu'est-ce que c'était ? Est-ce que c'était important ? Il se passerait quelque chose s'il l'enlevait ? Dans le doute, il n'y toucha pas... Il essaya de se rappeler de ce qui s'était passé... Les méchants de la Deepground, l'eau verte, ça lui revenait petit à petit... Il se souvenait du lion bleu qui lui disait que l'eau faisait oublier qui on était, un truc comme ça ? Vingt-deux se mit à paniquer, et s'il avait tout oublié ? Il ne voulait pas oublier Joan ! ... Non, ça va, il venait d'y penser, c'était qu'il s'en rappelait encore... Si ça se trouvait, l'eau verte n'avait eu aucun effet sur lui ! Mais pourquoi il se serait endormi d'un coup quand il était dedans, alors... ?

« Y... Y a quelqu'un... ? » osa-t-il demander.

C'était un peu calme, trop pour lui... Pas de méchants dans le coin... Que n'importe qui vienne, ça lui ira ! Par contre, il avait remarqué que sa voix était un peu bizarre, comme s'il n'avait pas parlé depuis longtemps... Il avait été persuadé qu'il n'a ait dormi qu'un jour, ou deux peut-être, mais maintenant il n'en était plus aussi sûr... En regardant autour de lui, il vit qu'il n'était pas vraiment seul ici, quelques gens étaient branchés comme lui... Mais pas réveillés... C'était vraiment inquiétant... Quelqu'un pouvait venir vite, si possible... ?

Elles avaient changé les draps, épousseté les oreillers. Les tâches des infirmières étaient ingrates, mais il fallait bien que quelqu'un s'en occupe et elles étaient payées grassement pour ça. Assignées du côté des sujets qui avaient été exposé à la mako, ce service était plutôt calme, puisqu'elles étaient avec ceux dans le coma.
Parfois, l'un d'eux se réveillait et c'était le cas aujourd'hui de ce petit bonhomme noir qui commençait à s'agiter. En l'entendant parler, l'une d'elle s'approcha de lui.

"Quelqu'un va arriver, du calme."

En attendant le "quelqu'un", Orca donc, l'infirmière prit les constantes de Vingt-deux. Tout semblait correct.
Sa collègue appelait Orca et Stephano et quelques minutes plus tard, ils étaient là.
Orca était tout cabotin, il avait hâte de voir si cette première expérience à la mako avait un peu altéré la personnalité du mage.

"De retour parmi nous le petit mage. Comment te sens-tu ?"

Vingt-deux avait été débranché, il pouvait maintenant manger quelque chose de plus solide. On lui apporta un petit plateau repas qui semblait un peu plus ragoûtant que ce à quoi il avait eu le droit jusqu'à alors.
Stephano examina rapidement Vingt-deux avant qu'il mange, s'il en avait envie, et lui posa quelques questions.

"Dis-moi ton nom. Et le mien."

La bonne réponse aurait été 2482 à la place du nom, mais s'il ne se souvenait pas de son prénom, il risquait difficilement de se souvenir de son numéro.
Le mage venait de se réveiller et déjà les infirmières revenaient vers eux pour leur demander quand il pourra libérer le lit...
Ils ne pouvaient pourtant pas le remettre en cellule tout de suite ! En revanche Orca fit amener un fauteuil roulant histoire que le mage ne reste pas alité plus longtemps. Après tout, il était resté inconscient pendant près d'une semaine et ils avaient besoin de le convertir au plus vite. Il fallait donc qu'il se remette de cette expérience rapidement. Dans le fauteuil, Orca qui avait troqué Stephano pour Ephrem, "promenait" Vingt-deux. Ils l’avaient emmené jusqu'à la cour intérieure qu'ils avaient déjà traversée pour aller dans le bâtiment où Vingt-deux avait affronté le dragon. Orca s'agenouilla devant lui.

"Très bien, j'aimerai vérifier quelques petites choses."

L'homme sortit quelque chose de sa poche. Orca connaissait les conditions dans lesquelles Vingt-deux avait été capturé. Il savait avec qui il avait été pris et l'avait vu avec ses caméras lorsqu'ils l'avaient laissé gambadé dans les couloirs. Il tenait devant Vingt-deux le médaillon du jeune homme qui s'était libéré et avait délivré d'autres prisonniers.

"Tu reconnais ceci ? Qu'est-ce que ça t'inspire ?"

Ephrem à côté d'eux avait reçu des ordres, pour le moment, il était surtout là pour intimidé. Il se souvenait qu'il avait eu le droit à une question similaire avec la montre de quelqu'un...il ne savait plus de qui. Il était censé reconnaitre l’objet. Peu de temps après on avait rendu sa montre à l'individu et Ephrem avait dû le violenter, ce qui ne lui avait causé aucun problème... Cependant ici pour Vingt-deux il n'était pas question qu'il fasse du mal au jeune homme du pendentif il était juste question de savoir s'il s'en souvenait, ou du moins s'il reconnaissait ses affaires et s'il était capable, si on le lui demandait, de blesser quelqu'un dont il avait été proche. Si oui, ce serait un jeu d'enfant de le faire attaquer n'importe quel inconnu.

* * *

Une semaine plus tôt, jour 15

Quel âge Ombre avait ? Si Joan le connaissait, il ne le croirait pas… En tout cas, il n’était pas resté inactif, hélas ! Le jeune homme avait résisté en infligeant deux coups à Ombre, pour tenter de s'enfuir ensuite, sûrement... Heureusement que la porte avait été bien verrouillée ! Enfin, tout ça ne ravissait pas Ombre, il ne pouvait pas se laisser faire, hein ? Et là, il tentait de lui parler avec des yeux humides... Il tentait de l'amadouer, ou quoi ? Ça fit rire Ombre...

« Un petit humain inutile, oui... » lança-t-il pour répondre à ce que Joan disait. « Tu sais, on peut faire aussi quelque chose de toi, t'inquiète pas ! »

S'il adoptait le bon comportement, il pouvait même devenir bien plus utile que ça... Après tout, si Ombre était arrivé jusqu'ici, lui aussi le pourrait...

« Bon par contre, tu pourrais, je sais pas... Arrêter de vouloir retarder ce que je veux faire ? »

Ombre voudrait éviter de passer le reste de la journée ici, il avait d'autres choses à faire... Pour l'instant, il n'était pas question de tirer sur le jeune homme, ce ne serait qu'en cas d'extrême nécessité... Ombre s'approcha de Joan, lui infligea un coup à la tête avec son arme (à défaut de tirer avec, autant qu'elle serve à quelque chose...) pour saisir le jeune homme et lui frapper la tête contre un mur... La même technique qu'Amaryllis quoi, sauf qu'Ombre avait moins de force qu'elle... Mais ça devrait au moins suffire pour légèrement l'assommer un petit moment... Ombre profita de cet instant pour le manipuler comme il l'entendait, en l'allongeant d'abord sur le ventre pour enfin lui nouer les mains dans le dos, avec un nœud bien serré...

« Voilà, maintenant couché et pas bouger ! »

Et il en profitait pour lui parler comment à un chien aussi... Toujours frustré de s'être fait frappé l'instant d'avant, Ombre décida de se venger en infligeant plusieurs coups dans les côtes de Joan. Une fois calmé, Ombre obligea le jeune homme à se retourner, puis il l'observa attentivement de haut en bas...

« Bon... Maintenant tu vas rester bien sage, hein ? Tout devrait bien se passer si tu ne bouges pas, tu devrais pas avoir mal... »

En même temps qu'il parlait, il s'était déshabillé puis s'était allongé sur Joan. D'une main, Ombre caressait les cheveux du jeune homme, puis lui dit :

« Tu t'es bien amusé avant, mais maintenant c'est à mon tour de m'amuser~ »

* * *

Quelques temps plus tard, la porte de l'infirmerie s'ouvrit, laissant entrer Ombre et un Joan qui avait été rhabillé à l'arrache, Ombre n'avait même pas pris la peine de détacher ses mains...

« Tiens Chris, j'te ramène ça, j'ai tapé dessus, tu peux vérifier si je l'ai pas tout cassé ?
- Vous êtes sérieuses ? Arrêtez d'abîmer les sujets, Amaryllis et toi... » répondit le type à lunettes.

Ombre lui lança un regard noir avant de repartir. L'homme soupira, puis s'approcha de Joan pour détacher ses mains.

« Tu t'attires tous les ennuis, toi... Tu as mal où ? » demanda-t-il ensuite.

Il devinait aisément ce qu'Ombre avait pu lui faire, et évita de lui dire quoi que ce soit à ce propos... L'homme n'était pas seul dans l'infirmerie, il y avait aussi cette espèce de lionne bleue qu'on lui avait amenée après qu'elle se soit battue, et plus loin dans un coin plus sombre, Conan, qui avait l'air de dormir à l'arrivée d'Ombre, mais à présent qu'elle était partie, il s'était relevé pour regarder ce qu'il se passait sans rien dire...

Une semaine plus tard, jour 22

Il y avait des dames ici... Est-ce qu'elles étaient gentilles ? Impossible à dire, elles ne faisaient pas grand-chose en tout cas... Quelques minutes plus tard arrivèrent deux personnes que Vingt-deux connaissaient déjà... S'il avait pu les oublier ces deux-là, ça l'aurait arrangé tiens ! Orca lui posait une question.

« Je me sens bizarre... » répondit le petit mage.

Il avait toujours sa drôle de voix, ça le perturbait... On apporta quelque chose à manger au Mage Noir, il n'était pas trop confiant mais il se força quand même à manger, puis ce fut au second homme de lui demander des trucs... Pourquoi il lui demandait son nom d'un coup ? Peut-être qu'il espérait que le Mage Noir aie tout oublié... Ce dernier regardait son interlocuteur, perplexe. Il songea à dire des bêtises juste pour voir sa réaction... ! Finalement, il renonça à cette idée bien vite, il le décevrait juste, c'était tout aussi bien !

« Moi, c'est Vingt-deux... » dit-il alors. « Et vous... Je sais pas ! »

Il n'avait pas la moindre idée de ce que c'était, son nom à lui... Est-ce qu'on lui avait dit au moins une fois ou non... ? Bah, peu importait, il n'avait pas besoin de le connaître ! De toute façon, il ne l'aimait pas ! On mit ensuite le petit mage dans un fauteuil à roues, et maintenant Ephrem avait remplacé l'autre homme... Et Vingt-deux ne l'aimait pas plus, lui ! À nouveau, Orca se décida à poser des questions au Mage Noir ; il lui tendait un médaillon... Vingt-deux eut un moment de panique au début... Non, c'est bon ! Il le reconnaissait ! Il tendit la main comme pour attraper le médaillon, tout en couinant :

« J-Joan... »

Puis, en regardant l'homme, il ajouta, le ton plaintif :

« Où est-ce qu'il est ? Il va bien... ?? »

Il ne répondait pas exactement aux questions d'Orca, mais... ça devrait sûrement lui suffire, comme réponses... Mais maintenant que Vingt-deux était lancé sur ses questions, il n'allait pas s'arrêter !

« Ça fait combien de temps que j'étais endormi ? Qu'est-ce que vous voulez faire avec moi ? Est-ce que c'est vrai que je vais tout oublier... ? »

Il se mit à pleurnicher malgré lui...

« Je... Je veux pas tout oublier... » gémit-il.

Il était évident qu'avec une seule immersion et si peu de temps passé ici, le mage était toujours lui-même et visiblement il avait toujours ses souvenirs.

"Je ne sais pas si ton ami va bien. Ma collègue a dû jouer avec, ça lui a peut-être plu."

Orca s'était relevé et en adressant seulement un regard Ephrem, celui-ci comprit ce qu'il devait faire. Le mage n'arrêtait pas avec ses questions. Orca perdit patience.

"Il va pourtant falloir que tu oublies, ce sera beaucoup plus facile, crois-moi." Ephrem avait frappé Vingt-deux. "Il faudrait aussi que tu comprennes que tu ne reverras plus ceux que tu as aimés. Mais, si jamais c'était quand même le cas, tu voudras surement leur faire du mal."

Après avoir corrigé Vingt-deux, Ephrem lui injecta le contenu d'une seringue dans l'épaule. Il perdit instantanément connaissance.

A son réveil, il aura la malencontreuse surprise de constater qu'il était dans une complète obscurité.
S'il essayait "d'explorer" son environnement, il remarquerait bien assez tôt, qu'il est dans une toute petite pièce. Et il n'y avait aucun bruit, seule sa respiration et les battements de son cœur pouvaient briser le silence.
On le laissa plusieurs heures avant que quelqu'un pousse enfin la porte et glissa sur le sol un plateau-repas dont le contenu semblait être la chose la plus dégoutante qu'ils aient trouvée.
On n'ouvrit la porte que le lendemain, c'était Orca. Il avait déposé une cage dans laquelle une petite créature s'agitait. Elle était assez mignonne et en temps normal, il suffisait de lui offrir une gemme pour qu'elle nous récompense, elle n'attaquait jamais. Vingt-deux la connaissait peut-être, il s'agissait d'une créature de son monde, un Eskuriax.

"Si tu le tues, je t'apporterais un repas digne de ce nom."

Le son de la voix d'Orca devait être salutaire, mais ce qu'il disait moins... Orca repartit, on ne servit à Vingt-deux que des trucs, il n'y avait pas d'autres mots, particulièrement infectes. Il avait le choix, soit il mangeait ça, soit il mourrait de faim, soit il tuait la créature qui était à présent sa seule compagne.

Trois jours plus tard, Orca vérifia si l'Eskuriax était toujours en vie. Si oui, Orca ferait venir Ephrem qui rouerait Vingt-deux de coups. Si non, il lui apporterait une assiette de blanc de poulet rôti avec sa sauce et des petites pommes de terre cuisinées, ce qui lui changerait.

Orca repassait régulièrement voir Vingt-deux, deux fois par jour, pour lui demander qui il était, lui poser des questions. Cependant, il ne répondit jamais à celles que pourrait poser le mage.
Au bout d'une semaine, Orca revint avec le pendentif de Joan et lui redemanda à qui il appartenait. Ephrem était à côté de lui, tous deux attendaient sa réponse. Deux semaines de captivité c'était court, mais en cas de mauvaise réponse, ils avaient encore tous leur temps.

* * *

Une semaine plus tôt, jour 15

L'homme à lunettes n'était pas étonné de la réaction de Joan... Il ne l'embêta pas plus, évita de le toucher et lui indiqua seulement où il y avait un lavabo. Il savait très bien ce qu'il ressentait... Il ne s'énerva même pas lorsqu'il le vit vomir dans sa corbeille...

« Mmh… Si tu veux, tu peux rester ici pendant un moment, le temps que tu ailles mieux ? »

Sincèrement, il aurait aimé pouvoir garder Joan dans l’infirmerie le plus longtemps possible. Ça lui aurait évité de se faire trimballer partout, ou qu’il lui arrive d’autres choses plus ou moins pires… Pour l’instant, il essayait de garder l’autre type au crâne à demi rasé, lui avait une très bonne raison de rester ici de toute façon ! S’il pouvait tenter de faire la même chose avec l’espèce de lionne, pour l’instant il l’avait gardée plus longtemps que prévu. Il aurait déjà dû appeler un garde pour qu’il vienne la rapporter dans sa cellule. Allons bon, voilà qu’il essayait de faire son gentil, est-ce que ça marcherait ça… Hélas, il ne se passa pas longtemps avant qu’Ombre ne revienne, l’air pressé…

« T’as fini de le vérifier c’est bon ?
- Pas du tout… » grommela l’homme.
« Eh ben tant pis t’as perdu, t’avais le temps, je le reprends maintenant ! »

Quelle gamine… Elle empoigna le jeune homme pour le ramener dans sa cellule, en prenant bien soin d’ajouter, avant de quitter l’infirmerie, qu’un garde allait repasser pour cette fois-ci emmener la minette bleue. Est-ce qu’elle avait compris les magouilles qu’il était en train de faire ? Si c’était le cas, elle ne l’avait pas fait remarquer. Bon, peut-être qu’il devrait réfléchir sérieusement à un moyen de sortir d’ici avant de se faire prendre… ?

Deux semaines se déroulèrent ensuite sans qu’on ne fasse sortir Joan de sa cellule plus que ça… Les rares moments où il pouvait sortir, il était accompagné d’un peu trop de gardes pour une seule personne, comme si on tenait absolument à le faire surveiller le plus possible pour qu’il ne tente pas de s’échapper à nouveau. Pas de retour de Conan dans la cellule du jeune homme, mais Ombre prenait un certain plaisir à y entrer soudain pour le terroriser… Les sorties ne consistaient en pas grand-chose d’original, des petits tests dans le genre de ceux d’Amaryllis (puisqu’Ombre semblait ne pas avoir d’imagination concernant la création de nouveaux tests), enfermer plusieurs sujets dans une pièce et les obliger à se faire du mal entre eux, avec punition si refus (puisque la peur de recevoir une correction pouvait assez bien éduquer, même si les punitions d’Ombre étaient un peu particulières…) et parfois, pour changer un peu, on emmenait combattre trois sujets au maximum qui se retrouvaient contre un monstre. Ils pouvaient peut-être s’allier pour vaincre le monstre, sauf que selon les règles, seul celui qui tuait l’ennemi était récompensé (puisque parfois l’éducation positive était utile, ça marchait bien avec les chiens, alors pourquoi pas avec des gens !), tandis que les deux autres étaient punis. Aucune restriction, ils pouvaient faire ce qu’ils voulaient pour gagner, même s’ils devaient éliminer les deux autres. Tout était fait pour qu’ils n’accordent pas leur confiance aux autres prisonniers, si la peur de se prendre une sanction les obligeait à s’attaquer aux autres sans réfléchir, c’était qu’ils étaient sur la bonne voie…

Jour 29

Les pleurnichements et gémissements de Vingt-deux ne l’aider pas particulièrement. Peut-être que s’il avait essayé de faire les yeux doux en même temps, ça aurait été plus efficace… ? Il ne pouvait même plus poser de questions, lui qui aurait voulu savoir ce qu’Orca entendait par "jouer"… Si le petit mage le savait réellement, il aurait sûrement préféré oublier… Enfin, en réalité, il aurait pu poser une question, mais n’osait pas… Ephrem venait de le frapper, et il n’avait pas envie de subir ça à nouveau. Les paroles d’Orca étaient plus qu’inquiétantes, mais Vingt-deux n’eut pas le temps de paniquer, qu’il se fit aussitôt endormir… Encore…

Lorsqu’il se réveilla, il constata qu’il n’était pas retourné sur l’un des lits où il s’était retrouvé plus tôt, mais il était… quelque part. Où, exactement ? Tout était noir, ici… Est-ce qu’il avait ouvert les yeux, au moins ? Il tenta de cligner les yeux pour vérifier, mais qu’il les ferme ou qu’il les ouvre, ça ne changeait pas des masses, tout était aussi obscur. À tâtons, il tenta de trouver quelque chose dans le noir, mais il semblait enfermé dans une petite pièce exiguë. Encore plus petit que la cellule, ou c’était son imagination ? Il n’entendait aucun son… Était-il non seulement encore chez les méchants qui voulaient qu’il oublie ? Si ça se trouvait… il était mort… ? Et maintenant, il était condamné à rester ici pour toujours, sans jamais pouvoir en sortir ? Recroquevillé dans son coin, le petit mage pleurnichait sans parvenir à penser à quoi que ce soit d’autre qu’à sa situation…

Longtemps après, il s’effraya lorsqu’il vit une porte s’ouvrir un repas entrer comme par magie dans la pièce. Sa panique cessa pendant un instant. Non, il n’était pas mort ! Il était toujours enfermé dans cet endroit bizarre avec ces méchants, mais… Au moins, tout n’était pas perdu ! Voilà ce que Vingt-deux se disait, mais il n’arrivait pas vraiment à se convaincre que tout irait bien. Après tout, il était tout seul ici… Sans magie, sans Joan, même s’il recevait à manger, il avait vu à quoi ça ressemblait, et il n’en mangerait sûrement pas ! Il attendit donc dans le noir, sans toucher à son assiette et en la poussant le plus loin possible de lui. Il s’endormit et se réveilla plusieurs fois, avant qu’on ne rouvre à nouveau la porte après un laps de temps indéterminé. C’était Orca, il avait apporté une cage avec une créature à l’intérieur… Un monstre ? Ça ressemblait à un eskuriax, mais celui-là n’était pas bleu comme les autres, mais orange… En plus, il n’avait pas l’air bien méchant… Et l’homme voulait qu’il le tue ? Mais il ne lui avait rien fait ! Orca était reparti, mais Vingt-deux était résolu à ne pas faire de mal à cette pauvre bestiole ! Il pouvait tenir encore quelques jours sans manger, de toute façon…

À présent, il était à nouveau dans le noir, pas tout seul cette fois, même si l’eskuriax ne faisait pas trop la conversation… Vingt-deux s’était mis à lui parler, il lui racontait tout sur Joan, comme pour être sûr que s’il oubliait quelque chose, la bestiole pourrait le lui rappeler… Il lui parla d’un peu de tout et n’importe quoi ensuite, en parlant comme ça, il en oubliait de paniquer de sa situation… Trop de temps passa à son goût, Orca finit par revenir après ce temps indéterminé… Bien sûr, Vingt-deux n’avait pas touché à un poil de l’eskuriax, ce qui parut déplaire à l’homme, qui appela Ephrem pour qu’il le frappe… Autant dire que ça n’avait pas été une expérience très plaisante pour le petit mage, qui se surprit à penser qu’il avait peut-être dû faire ce que lui avait dit Orca pour éviter ça… Surtout qu’on lui avait retiré la petite bestiole, il ne pouvait plus lui parler pour passer le temps, à présent. Tout ça pour ça… Puis, l’homme revenait souvent dans la petite pièce noire pour venir poser des questions au Mage Noir, toujours les mêmes on dirait… Ce dernier se demandait vraiment pourquoi il insistait vraiment à lui redemander toujours ça, il devait connaître les réponses à force, non ?! Mais Vingt-deux restait confus, des fois il se trompait parce qu’il se demandait pourquoi il lui demandait telle chose… Parfois il racontait n’importe quoi parce qu’il n’avait pas envie de lui dire la bonne chose… C’était agaçant, ces questions, à force !

Puis un jour, Orca était revenu, mais avec une réponse différente, cette fois-ci. En effet, il avait encore apporté ce pendentif… Il resta un long moment à le regarder silencieusement, l’air confus, puis se redressa d’un coup pour tenter de frapper le pendentif par surprise et faire en sorte qu’Orca le lâche…

« Laissez-moi tranquille ! » lança le petit mage, ce qui ne répondait pas du tout à la question de l’homme…

Il avait l’air déterminé à ne donner aucune réponse… Il s’était rassis et fixait Orca et Ephrem, l’air frustré, attendant qu’ils repartent…

Jour 36

Après avoir rendu visite à un jeune guado fraîchement capturé sur qui il fallait crier un peu pour qu'il fasse ce qu'on lui demandait de faire. Orca finissait sa journée par son passage obligé dans la pièce où était enfermé le mage. Il était plutôt confiant cette fois, on l'avait trop sermonné pour qu'il obtienne de bons résultats, Orca se sentait menacé et sous pression. Mais, cette fois, la pression avait laissé place à un semblant de sentiment de soulagement quand il constata qu'aux fils des jours, la volonté du mage vacillait. Surtout qu'il n'avait pas envie de le tuer, ça aurait été dommage.

Ce jour-là, une nouvelle fois, Orca était venu avec Ephrem et la cage de l'Eskuriax, qui cette fois ne contenait pas uniquement une créature, mais deux. Ephrem était toujours si peu bavard, se contenta de rester à la porte les bras croisées attendant les ordres d'Orca. Il avait de nouveau le pendentif de Joan et encore une fois il lui demanda à qui il appartenait.

"Tu sais... Il est peut-être à moi ce pendentif, après tout je l'aime bien. Mon petit 24-82, qu'en penses-tu ?"

Orca s'était agenouillait et tenait dans sa main le menton de Vingt-deux pour s'approcher tout près de lui.

"Comment tu t'appelles ?"

Toujours ces mêmes questions et la même façon de procéder. Ils avaient même "oublié" de distribuer ces repas pendant plusieurs jours; Ils avaient même diffusé dans cette petite pièce un affreux son strident qui crachait ses sons aigus de deux haut-parleurs trop hauts pour qu'on puisse les distinguer dans cette obscurité. Lorsqu’Orca entrait, on coupait alors les haut-parleurs offrant ainsi un semblant de paix au mage.

"Tu n'en a pas marre ? Dis-toi que tout serais fini si tu venais avec moi. Tu pourrais manger des vrais repas, Revoir la lumière du soleil. Voir d'autres visages que le mien. Beaucoup de privilège pour très de sacrifice. Ne veux-tu pas sortir d'ici ?"

Orca prit l'arme qu'il avait jusque-là caché à sa taille sous son long manteau et visa la cage aux Eskuriax avec.

"C'est facile pourtant, regarde." Orca tira sur l'un des deux Eskuriax et le tua sur le coup. Le deuxième affolé, se jeta contre les barreaux de la cage. "Quelle est la différence entre les tuer eux ou tuer un animal pour le manger ? Ou comme un monstre qui tue des humains qui ont le malheur de se promener en dehors des villes ? Pourtant ne le pourrais-tu pas ? Qu'est-ce que ça changerait dans ta vie de le faire ? Rien. Au contraire, tu aurais tellement d'avantages."

Sans démonter et avec une totale confiance en ce qu'il faisait, Orca tendit l'arme à Vingt-deux.

"Tue-le et tous tes problèmes seront terminés."

Enfin non, pas vraiment, mais il fallait bien que cette histoire avance un peu, ils continueraient de le garder à l’œil bien sûr, c'était aussi pour ça qu'Orca gardait toujours Ephrem près de lui bien qu'il ait été converti depuis maintenant six mois.

* * *

Une semaine de plus s'était déroulée, durant laquelle le train-train quotidien continuait... Mais cette fois-ci, l'homme à lunettes avait déserté l'infirmerie pour avancer dans les couloirs à la recherche de deux cellules spécifiques. Il venait de faire un tour dans la réserve du secteur voisin pour se munir des différentes affaires de ceux qu’ils venaient chercher. Les trouver dans ce capharnaüm n’avait pas été très facile, mais il avait fini par réussir ! Il avait avec lui le type au crâne à demi-rasé qu'il traînait depuis un moment dans son infirmerie sans que personne ne vienne lui demander d'en sortir, à croire qu'il n'intéressait personne... Il lui avait déjà restitué ses affaires. L'accompagnait aussi une "pensionnaire" qu'il ne rappelait pas avoir vu depuis qu'il était ici, pourtant on lui avait certifié que ça faisait longtemps qu'elle était ici... Une espèce de lézarde qui était apparemment devenu sage au fur et à mesure des semaines après avoir tenté de s'enfuir avec tout un groupe, ce fameux jour... On l'avait assignée en tant que garde dans ce secteur vu qu'elle était à présent très obéissante... Disait-on.

Ils étaient donc dans les couloirs, et avaient d’abord rejoint une première cellule, de laquelle il avait fait sortir Irga ; il l’invita à le suivre après lui avoir fourni ses affaires, lui ordonnant de se changer, sans dire plus de choses, puis il rejoignit la seconde cellule où il voulait se rendre. Là, le garde devant ne lui laissa pas le temps d’arriver qu’il l’agressa tout de suite :

« Vous pouvez pas m’envoyer ailleurs ? »

Wah, même pas un bonjour ! Quel malpoli…

« Ce type n’arrête pas de me parler ! » continua le garde en désignant la porte de la cellule. « Je vais devenir fou s’il continue !
- Ça tombe bien, voici la relève. » répondit le type à lunettes en désignant la lézarde. « Vous pouvez disposer !
- Ah ? Ben… merci ? »

Il s’était visiblement attendu à devoir insister plus longtemps… Il partit donc, enfin libéré de ce travail qu’il jugeait monstrueux ! L’homme attendit de le voir disparaître au bout du couloir, avant d’ouvrir la porte de la cellule de Joan.

« Suis-moi. » lui dit-il, sans lui apporter plus d’explications que ça.

Il lui tendit ses affaires, il ne semblait n’avoir rien oublié… Il attendit que le jeune homme soit prêt à le suivre avant de repartir avec sa petite troupe. Tout derrière donc, Suzie qui semblait servir de garde, les surveillait avec une arme à feu en main. Elle regardait droit devant elle et n’avait aucune réaction aux interactions extérieures… Ils quittèrent le secteur et, toujours dans un silence inquiétant, le type les emmena direction l’ascenseur qui permettait de se rendre à la surface. Devant lui, deux gardes surveillaient les allées et venues pour vérifier que personne de non-autorisé ne passait par-là.

« Halte, où allez-vous comme ça ? » lança l’un des gardes.

Il se croyait au Moyen-Âge à parler comme ça… ?

« Je les envoie en mission sur le terrain. » répondit simplement l’homme.

Les deux gardes se regardèrent, sceptiques… Mais laissèrent tout de même passer la petite troupe, qui put prendre l’ascenseur. Le meneur du groupe restait toujours silencieux, si quelqu’un autre que les gardes lui posait une question, il n’y répondrait pas. Le trajet de l’ascenseur se fit dans un calme pesant… Avant d’arriver tout en haut, et d’en sortir. Encore quelques pas avant d’être presque sûr d’être sorti d’ici… Mais c’était sans compter sur la présence d’un énième garde qui surveillait ceux qui entraient et sortaient ; ils avaient fait fort sur la sécurité, quand même… Le garde lui demanda où ils se rendaient comme ça, le type à lunettes répéta la réponse qu’il avait fournie au garde plusieurs mètres plus loin dans le sous-sol… Ce à quoi, on lui répondit :

« J’ai besoin de voir un laisser-passer. »

Euh, pardon ?

« C’est les mesures de sécurités ça, tout personnel non autorisé qui sort a besoin d’un laisser-passer. »

Et naturellement, on ne l’avait pas mis au courant…

« Euhm… je l’ai oublié dans mon bureau.
- Dans ce cas, je vais vous demander de faire demi-tour avant que… »

Le garde n’eut pas le temps de finir sa phrase, Suzie s’était servie de son arme pour abattre le garde avant qu’il ne fasse quoi que ce soit…

« Allez, on dégage avant qu’ils se ramènent ! » s’écria-t-elle, l’air beaucoup plus réveillée qu’avant !

Elle poussa tout le monde pour les forcer à se dépêcher, courir le plus loin possible et disparaître dans la ville. Ils n’avaient pas fait quelques mètres encore que la lézarde s’arrêta et se retournant en direction de l’ascenseur.

« Barrez-vous ! » indiqua-t-elle. « Je vais les retenir ! Évitez de vous faire trucider ! »

Et elle repartit dans la direction opposée, laissant le reste du groupe à la charge du type à lunettes, qui les emmena à travers Midgar.

Le temps dans cette petite pièce était bien trop long… Même s’il n’était pas sûr de combien de temps s’était déroulé depuis qu’il avait été enfermé ici. Ça devenait de pire en pire… Le petit mage avait souvent très faim, il lui semblait qu’on ne lui donnait pas toujours de quoi manger… Ou est-ce que c’était son imagination ? Peut-être qu’ils lui en donnaient tous les jours, mais comme il avait perdu la notion du temps dans cette petite pièce toute sombre, il ne le remarquait pas ? En tout cas, il était sûr qu’on venait le voir tous les jours ! Ou tous les deux jours ? Si ça se trouvait, c’était en réalité toutes les heures… Le Mage Noir était complètement perdu. Qu’est-ce qu’il pouvait faire pour qu’on le sorte d’ici ? Coopérer ? Se montrer gentil ? Pourtant il l’avait été depuis le début, et ça ne l’avait pas franchement aidé… Il n’était même pas en paix dans cet endroit. Alors qu’il aurait pu être tout seul à se morfondre dans ses pensées, on lui faisait entendre des bruits bien désagréables dont il n’arrivait pas à trouver l’origine. Ils étaient impossibles à ne pas entendre… Lorsqu’Orca arrivait, les bruits s’arrêtaient. À force, il voyait à chaque fois son apparition comme une libération, il essayait de l’empêcher de partir, puisque sitôt fait, les bruits recommençaient… Si seulement il pouvait rester plus longtemps ou le sortir de là…

Cette fois-ci, l’homme était encore revenu, et le petit mage ne voulait pas du tout le laisser filer… Il était prêt à faire n’importe quoi pour sortir d’ici, maintenant. Orca lui montrait un pendentif que le Mage Noir aurait dû reconnaître… Il avait l’esprit tellement rempli des sons qu’il avait entendu, ça résonnait dans sa tête, et ça ne l’aidait pas à penser à autre chose… L’homme lui demandait à qui appartenait l’objet, et il lui demandait aussi son nom. Le Mage Noir hocha la tête comme s’il ne comprenait pas trop…

« Vous venez de dire mon nom, non… ? »

Il était perdu… Il voulait sortir… Il n’arrivait pas à penser correctement…

« S’il est à vous, vous pouvez le garder… » répondit-il quant à la question sur le pendentif.

Il n’en voulait pas lui, de toute façon… Pourquoi il voudrait le prendre ? Et puis là, la proximité avec l’homme le mettait un peu mal à l’aise… Ce dernier se lançait dans un discours plein d’espérance pour le petit mage qui voulait à tout prix sortir… Il s’effraya lorsqu’Orca tira avec une arme sur l’une des bestioles de la cage qu’il avait ramenée. Puis, il avait tendu l’arme au Mage Noir en lui disant de tuer l’autre bestiole. Le petit mage prit l’arme, sembla hésiter un instant – impossible de savoir s’il hésitait parce qu’il ne savait pas s’il avait envie de l’utiliser, ou parce qu’il ne savait juste pas comment se servir de l’arme… – puis, après quelques secondes, il finit par tirer une fois vers l’animal, qu’il toucha sans trop blesser, puis une deuxième fois où il ne le manqua pas ; la bestiole s’effondra après avoir poussé un couinement de douleur. Le Mage Noir resta un instant sans bouger, il ne disait rien et observait la cage… Puis il tourna doucement la tête vers Orca, et lui tendit l’arme en retour, toujours en silence. Mais on pouvait bien lire dans son regard qu’il espérait vraiment que ça allait le faire sortir d’ici…

Ephrem avait quitté la pièce en emportant avec la cage de l'Eskurias. Il laissa Orca seul avec Vingt-deux. Les réponses du mage étaient enfin satisfaisantes, ils pouvaient avancer. Orca sortit de sa poche ce qui ressemblait à un délicieux morceau de guimauve et il le tendit au mage.

"Je pense que tu es prêt à sortir d'ici."

Bien sûr, il n'était pas entièrement confiant, mais les choses allaient dans le bon sens. Orca ordonna à Vingt-deux de se lever, il posa sa main sur son épaule et le guida à travers un dédale de couloirs pour le conduire à ce qui ressemblait être le mess de l'établissement. Il y avait beaucoup de monde. Des gens habillé en civile, comme Orca et d'autres en uniforme. Orca s'était penché sur Vingt-deux pour lui dire :

"Ils te plaisent ces uniformes ? Tu en porteras un comme ça bientôt. Mais avant cela..."

Orca s'était approché des cuistots et d'une bonne femme rondelette avec une charlotte sur la tete pour lui demander de servir un bon repas à son "ami".
Orca installa Vingt-deux à une table près de lui où il y avait déjà un homme en civile et trois personnes en uniforme. Une viéra, un humain et un jeune al-bhed. Orca commençait à les reconnaitre, pour les viéra, ce n'était pas compliqué avec leurs oreilles de lapin, pour les al-bhed c'était plus subtil, il fallait bien examiner leurs yeux.

"Bonjour Shiro comment se porte ta petite troupe ?" Demanda Orca à l'homme en civil, qui était donc en charge de ses membres fraichement convertis.

-"Bien" répondit l'homme. "Comme tu peux le constater, leur première mission s'est déroulée sans encombre. J'ai bon espoir qu'au moins l'un d'eux soit promu au rang de Tsviet"
-"Cette fois sera la bonne, on finira ce que Hojo avait commencé. Serait-il possible que celui-là rejoigne ton groupe ?" dit-il en désignant Vingt-deux.
-"Tu m'as fait parvenir son dossier, je l'ai pas encore lu. Mais tant qu'il me reste un poste vacant, je suis pas fermé. Mais tu fais quoi d'Ephrem ?"
-"Il est instable, je préfère le garder à l’œil. Pour le mage il aura besoin d'être encadré, avec tes trois là, je me fais pas de souci."
-"Je devais les emmener à Junon titiller la WRO. Je suis pas sûr que ce soit la meilleure chose à faire pour "commencer" avec ton petit. Cela dit, c'est peut-être remis en question après la fuite de Christopher et de ces trois protégés ?"
-"Tu es déjà informé."
-"Tout le monde est au courant, même sans l'alarme, l'info à vite circulé. Au moins ce service-là fonctionne bien..."

Suite à cette remarque sarcastique, Orca se leva et alla chercher le repas de Vingt-deux qu'il posa devant lui. Lui-même n'avait pas trop faim, il se contenta de regarder Shiro et sa troupe manger. C'est vrai que d'envoyer Vingt-deux à Junon pour une première mission c'était velu... En plus, il faudrait qu'ils s'occupent de récupérer quelqu'un pour remplacer Christopher à l'infirmerie. Mais, envoyer Vingt-deux avec une autre équipe pour un "recrutement" ce serait encore pire...

"Vous irez sur Junon en civile de toute façon ? Il suffit de ne pas vous faire repérer, c'est un mage, en cas de problème il restera en arrière."
-"Ok, je te le prends. On part demain, prépare-le."

Tiens, finalement il avait été plus facile à convaincre que prévu. Qu'ils aient fini ou pas, Shiro rappela sa troupe. Les trois le suivèrent sans piper mot, même si le jeune al-bhed eut une attitude qui étonna Orca. Il emporta avec lui sa cuisse de poulet pour le manger en marchant. Il ramena une longue mèche de cheveux blonds derrière son oreille de sa main inoccupée et rattrapa Shiro.

"Ils seront tes nouveaux amis" affirma Orca à Vingt-deux. "Ce soir tu restes avec moi, je t'ai amené une chambre plus confortable que ta cellule. Je pense que tu y seras à ton aise. Fini de manger tes nachos et suis-moi."
Orca attendit un moment avant de guider à nouveau Vingt-deux dans les couloirs et de s'arrêter devant une porte.

"découvre ton nouveau chez-toi."

Les quartiers de Vingt-deux donc. Ce serait dorénavant là qu'il vivrait, qu'il dormirait après chaque retour de mission. C'était simple, mais assez spacieux - surtout en comparaison de la pièce qu'il avait occupée précédemment. C'était sobre mais fonctionnel, il y avait un grand lit, un petit bureau, il avait une petite salle de bain et Orca avait même préparé son uniforme à Vingt-deux qui était soigneusement plié sur le lit. Mais qu'il ne devrait donc pas porter tout de suite... Il y avait aussi le sac de Vingt-deux avec ses affaires, sauf son bâton bien sûr. Il pourrait donc se rhabiller.

"Je te laisse, je ferme la porte. A demain."

Et Orca ferma à clef derrière lui.

Quel soulagement ! Il pouvait enfin sortir de cette horrible pièce dans laquelle il était enfermé depuis bien trop longtemps ! Il accepta volontiers ce que lui offrait Orca, même s’il ne savait pas ce que c’était, il le porta à sa bouche pour le manger quand même… Il suivit ensuite l’homme à travers les couloirs sans poser de question, et ils finirent par arriver dans une grande pièce remplie de monde. Si on regardait bien le petit mage, on pouvait remarquer qu’il n’était pas entièrement à l’aise au milieu de tous ces gens… En même temps, Orca lui parlait des uniformes que certaines personnes que Vingt-deux voyait portaient.

« Si vous en avez à ma taille… » marmonna-t-il pour répondre à ce que l’homme disait.

Ce serait toujours mieux que de porter les vieux trucs qu’on lui avait donné depuis son arrivée ici… Il n’était pas très confortable dedans… Après ça, il suivit Orca en direction d’une table où se trouvaient quatre autres personnes. Il y avait deux humains, et… une humaine avec des oreilles de lapin… ? Le Mage Noir la fixa longuement sans rien dire … Il écoutait en même temps ce qu’Orca disait au dénommé "Shiro", ils parlaient de "Tsviet", "WRO", "Hojo"… D’accord, Vingt-deux ne comprenait rien... Il ne réagit pas plus que ça à l’évocation de personnes qui s’étaient apparemment enfuies… On donna un repas qui avait l’air plus appétissant que tout ce qu’il avait pu voir les jours précédents au petit mage, qui ne fit pas prier pour le manger ! Des "nachos" que c’était, apparemment… En même temps, Orca lui disait que ceux-là seraient maintenant ses amis, il partirait sûrement avec le lendemain… Vingt-deux n’objecta pas, il finit de manger comme l’homme lui ordonnait, puis le suivit jusque dans une chambre plutôt spacieuse. Orca le laissa ici, avant de repartir.

« Au rev… » commença le Mage Noir, avant de s’arrêter. Trop tard, il était parti…

Il se mit alors à inspecter la pièce, à regarder dans son sac pour vérifier s’il avait toutes ses affaires… Presque… Il soupira, puis entra dans la salle de bain pour se laver. Il galéra… Une fois ça fait, il retourna dans la chambre, observa l’uniforme posé sur le lit, qu’il déplaça ensuite sur le bureau, pour enfin se coucher… Qui sait ce qu’il ira faire demain…

-Vingt-deux et le groupe de Shiro partent pour Junon.