L'arrivée

Le conducteur de la voiture ne semblait pas vouloir répondre aux questions d’Elya, il soupirait et continuait de regarder la route. Le deuxième soldat positionné à l’arrière de la voiture aurait sans doute voulu répondre, mais il avait juste l’air confus et était pour l’instant silencieux. Par contre, ils avaient bien remarqué que le jeune homme s’était penché en avant.

« N’essayez même pas de vous glisser à l’avant ou je ne sais quoi, vous risqueriez de passer un mauvais moment. » lança le conducteur, qui pourtant n’avait même pas regardé vers l’arrière pour vérifier ce qu’il se passait.

L’autre avait un taser en main juste au cas où… À moins de lui enlever des mains il ne fallait pas tenter quoi que ce soit, ou il subirait le même sort qu’Ivory ! Par contre, avec ce silence, ils finiraient par remarquer qu’Elya tentait quelque chose d’autre que se pencher. Samaël avait bien compris qu’il avait quelque chose derrière la tête, et il n’allait sûrement pas le dénoncer aux soldats, alors il prit la parole pour un peu atténuer ce silence :

« Il n’est pas à l’aise dans ce véhicule, il n’y en a pas de cette sorte sur son monde. »

Il n’en savait rien du tout, mais ça passerait crème, surtout que ça concordait avec la dernière phrase que prononçait Elya.

« Un portail ? » s’étonna le garde à côté d’eux (qui n’avait toujours pas remarqué qu’Elya tentait quelque chose avec ses menottes, notons-le) « Son monde ? »

Il était juste… confus. Il semblait réfléchir, les sourcils froncés, à ce que venaient de dire leurs deux captifs, et ce fut au conducteur de prendre la parole :

« Des portails vers d’autres mondes ? Qu’est-ce que vous racontez comme stupidités ? Ça n’existe pas. »

Le second garde fronça encore plus les sourcils en regardant en direction de son collègue.

« Arrête de parler et concentre-toi sur la route, tu vas nous provoquer un accident encore. »

"Encore"… Comme si ça leur arrivait souvent, tiens ! Le conducteur soupira et l’autre inspecta en détail Elya et Samaël. Peut-être qu’il valait mieux ne pas trop bouger maintenant, sinon il risquerait de se douter de quelque chose…

« Ça pourrait expliquer vos accoutrements un peu… bizarres… » Ça ne ressemblait pas du tout à ce qu’il voyait quotidiennement, en tout cas…
« Ne leur fais pas aveuglément confiance, ils sont sans-collier au cas où tu ne l’aurais pas vu. »

Le soldat sur la banquette arrière relança un regard mauvais en direction de son collègue, avant de jeter un regard en direction des deux autres.

« On va répondre à vos questions quand on sera arrivés au poste. Ah, et vous pourriez redire votre machin avec le portail une fois qu’on sera là-bas ? Juste au cas où… pour être sûr… » Puis il ajouta, un peu plus bas. « Ah, si vous vous sentez mal, est-ce que vous pourriez éviter de vomir sur les sièges ? Essayez de vous retenir… je sais pas…
- Ce n’est pas lui qui va vomir, je pense. » commenta Samaël, qui, depuis qu’il avait osé regardé ailleurs que par la fenêtre, réalisait que voyager dans ce genre de véhicule ce n’était pas pour lui…
« Non ! Retenez-vous ! On est bientôt arrivés !! »

Dans l’autre voiture, ce n’était pas du tout la même ambiance, les deux soldats entourant nos protagonistes n’étaient pas aussi sympa que ça, ils tiraient des tronches sérieuses mais si on se penchait un peu plus dessus, on noterait la ressemblance avec des bulldogs, des vrais chiens de garde… ! Même Lamy s’était tue, elle fixait ses prix avec le regard vidé de toute émotion. Si on lui parlait, elle ne réagirait peut-être pas, ou alors jetterait rapidement un regard vers son interlocuteur avant de l’ignorer parfaitement.

Du côté du protagoniste parti rue des ancolies, les soldats s’étaient avancés, mais personne ne semblait sans-collier dans le coin. Bien heureusement, il y avait un témoin sur le côté de la route, à qui ils demandèrent des précisions sur où pouvait bien être passé ce délinquant.

« J-Je ne sais pas ! Il était là, et d’un coup, pouf ! Il a disparu ! »

Les soldats se regardèrent, perplexes. Comment avait-il pu disparaître sous les yeux d’un témoin ? Il devrait bien être dans le coin de toute façon, et il ne pourrait pas aller bien loin. Aucun sort d’invisibilité n’existait sur ce monde, et c’était bien compliqué et comprendre ce qu’il s’était passé pour eux… Comment pourraient-ils détecter quelqu’un qu’ils ne pouvaient pas voir ? Si seulement ils avaient eu des chiens avec eux, pour le pister et le retrouver. Après tout, même si un animal ne pouvait pas le voir, il pourrait très bien le sentir !

Avec l’hésitation des soldats, le jeune devait très bien les avoir dépassés depuis quelques instants. Alors, son tour de passe-passe allait être gagnant ? Une large silhouette quadrupède apparut soudainement d’une ruelle et courut à toute vitesse, passant à côté des soldats sans s’arrêter. Sans aucune hésitation, elle fonça vers notre protagoniste, et abattit sa grosse patte sur lui pour le clouer au sol, alors même qu’on ne le voyait toujours pas !

« Je fais ça pour ton bien, gamin. » chuchota l’animal à l’oreille du jeune.

Il mettait presque tout son poids sur lui et l’empêchait de bouger, jusqu’à ce que les soldats finissent par le remarquer, pour enfin l’embarquer, comme furent embarqués nos autres protagonistes avant lui.